Ce qu’il y a de bien, sur les chats, c’est qu’on y trouve de tout, le meilleur (rarement) comme le pire (pas trop souvent) et beaucoup d’imaginaire. Sur Nethomo, que je fréquente à mes heures de sommeil perdues, chacun coche des cases en fonction de ce qu’il est (actif, passif, gay, bi…) et de ce qu’il recherche, pour se décrire derrière son anonymat.
En bonne logique, si l’on utilise le moteur de recherche, on doit tomber sur son symétrique pour que ça marche, le donneur universel étant, pour comparer avec les groupes sanguins, le recto-verso. Evidemment, ceux qui ne cochent aucune case et ne mettent pas de photo sont déçus qu’on ait du mal à lier conversation.
Intervient alors le magique “dispo cam ?”. Pas si magique que ça, en fait, et surtout trop intrusif : si l’anonyme curieux envoie une “demande cam”, trop souvent il oublie, ou plutôt il omet, d’allumer la sienne – pas très élégant, et ça tourne court. Et s’il accepte, ça se termine sur MSN en plaisir partagé mais néanmoins solitaire, à déconseiller aux vrais romantiques.
Un soir, un camarade chatteur m’a expliqué : “viens plutôt sur Yahoo, on peut faire du multi-cam”. Je me demandais vers quel genre de multiculturel il voulait m’attirer mais j’ai eu envie de voir, par curiosité – et je n’ai pas été déçu : j’ai découvert une douzaine de petits écrans alignés avec des mecs en train de s’astiquer en gros plan, genre rayon charcuterie chez Auchan, et encore pas hallal ni kasher. A ne pas renouveler car, comme on dit, trop de sexe(s) tue le sexe !
Sans doute l’indélicatesse est-elle fréquente puisqu’on lit de plus en plus, dans les fiches de présentation : “sans photo pas de réponse”; “pas de plan cam” ; “mythos s’abstenir” ; “ni jeunes, ni vieux, ni pervers” ; “pas plus de cinquante kilomètres”. Remarques souvent assorties de panneaux de sens interdit, à se demander si tous ces déçus de la vie ou du chat ont aussi un sifflet à roulette pour verbaliser les contrevenants.
Malgré tout, je serais faux-cul de rejeter en bloc ces chats. J’y ai fait des rencontres superbes, avec des garçons qui avaient quel chose à raconter, des plaisanteries à échanger, un peu d’émotion à offrir, des exigences gentiment délirantes. Je ne trahirai aucun pseudo, mais j’ai même gravement flashé sur un jeune homme à la fois mignon de sa personne et touchant dans son discours, mélange de soumission forcenée et de provocation outrée. Conscient de ses charmes, il se laisse aller aux confessions les plus intimes et les plus spontanées, jouant à cache-cache avec des photos qu’il fait apparaître et disparaître aussitôt.
Je me suis piégé en tombant amoureux, un amour d’autant plus violent qu’il était impossible et virtuel, puisque nous ne sous sommes jamais rencontrés. Et de toutes façons j’avais fait une grave erreur en confondant Nethomo et Meetic. Bêtement malheureux, je me suis forcé à prendre mes distances et à me détacher, pas évident quand on conserve une âme romantique. D’autant que l’intéressé se plaint sur sa fiche de ne faire que des rencontres d’un soir et de ne pas être un objet de consommation.
J’ai heureusement concrétisé des rencontres réelles, différentes et moins idéales, mais sans doute beaucoup plus authentiques avec d’heureuses surprises. Entre deux chats il y a les entrechats : la réalité est parfois plus épanouissante que le rêve qui consume. Steph, message personnel, je suis guéri et te laisse tranquille… mais je reste tel le peintre fasciné par le modèle, il faudra bien un jour que tu me laisses faire ton portrait !
Le virtuel est la force et la faille de ces sites. Beaucoup viennent y rêver et se projeter, mais la réalité est d’autant plus difficile à saisir quand on se réfugie dans les rêves, au risque non seulement de se piéger soi-même mais de piéger les autres. C’est ce qui m’est arrivé une autre fois, et je n’avais pas fait attention à l’horoscope chinois : c’était l’année du lapin qui commençait, j’aurais dû me méfier. Pourtant, tout avait bien commencé. Un étudiant dans la vingtaine, sans photo explicite sauf une vue en contre-plongée sur ses joues arrières, cachant mal un sourire vertical.
Un message plus clair, “cherche homme de préférence mûr pour m'initier au plaisir entre hommes,
pas trop d'expérience mais apprend vite :) tout ça dans la bonne humeur et la discrétion…” Des annonces comme ça, en forme de clin d’œil, il s’en rencontre un certain nombre. On n’y croit pas
plus, mais cet étudiant m’a agressé d’un “coup de cœur”, d’où ma découverte de sa fiche, et il a insisté en m’appelant pour un chat.
Il voulait absolument une rencontre rapide, mais dans un endroit discret, dans un quartier discret, refusant même de prendre un verre dans un bar pour faire connaissance. Après deux soirs de dialogue, il m’a convaincu d’aller l’attendre le troisième soir dans un hôtel, m’a donné une heure, et… n’est jamais venu. Quand je lui ai envoyé un message interrogatif, il s’est contenté d’un “perdu mon portable”. C’était sans doute mieux comme ça, et j’ai appris à être plus attentif. Adieu, lapin, adieu amants virtuels !
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